Dimanche 15 avril
2018 j’ai bouclé mon premier 200.
Je fais partie de
ceux qui se sont réveillés « unmatin avec un âge qui commence par un 3 ». Combien de fois
adolescent j’ai vu mon père se lever aux aurores le dimanche pour
aller faire du sport en me disant dans mon for intérieur de rebelle
« JAMAIS ! ». Combien de fois adulescent je me suis
moqué de mes glorieux aînés qui quittaient notre estaminet favori
avant même le coucher du soleil pour aller trouver le repos avant
une sortie matinale, alors que je m’apprêtais à être emporté
par une de ces récurrentes fièvres du samedi soir.
Mais voilà, un jour
j’ai eu 30 ans. J’ai commencé naturellement à me lever tôt le
dimanche. Je voyais jalousement les copains et copines prendre du
plaisir à faire du sport durant le jour du seigneur. Et je me suis
dit pourquoi pas moi ?
J’ai profité
d’arriver à un compte rond pour trouver une idée de cadeau
collectif pour papa-maman-compagne-ami·e·s : un beau vélo
pour faire du cyclisme, du vrai. J’ai jeté mon dévolu sur un
Charge Plug 4, trouvé d’occasion sur les internets. UNE AFFAIRE
qu’on m’a dit.
Je me mets à rouler
un peu le dimanche avec le fameux « Club des petits vieux ».
Et puis de but en blanc on me dit « De toute façon tu fais le
200 cette année. ». Je n’avais visiblement pas le choix. Ça
doit faire partie d’un rite initiatique. J’ai dit, oui, sans trop
réfléchir.
Je m’équipe comme
un petit pro chez mon vélociste favori : des bons pneus pour
rouler sur la route et se permettre des escapades en dehors des
sentiers battus (yes man roots again!) des pédales et chaussures
automatiques pour bien se péter la gueule au cédez-le-passage, une
sacoche pour transporter un fructueux pique-nique, des bidons pour
s’hydrater, une trousse à outil, etc. Bref, le vélo est prêt.
Pour le bonhomme c’est une autre paire de manche. La date
approchant je commence sérieusement à me demander si j’arriverai
au bout de cette aventure. On me rassure, on me conseille, on
m’encourage. Je vais finir par m’en convaincre : j’irai au
bout et pis’ c’est tout.
Me voici donc
dimanche 15 avril au matin arrivant au vélodrome d’Angers. Là
notre petite équipe se forme. Je suis bien entouré puisque notre
équipage compte dans ses rangs : le meilleur vélociste de la
ville d’Angers, un multiple champion du Poitou (catégorie enfant
pré-pubère, pubère, jeune mâle), un kiné, un coach sportif et un
informaticien qui a intégré le parcours dans ses moindres détails
directement sur sa carte mémoire interne. Un autre comparse, jeune
trentenaire comme moi est également de l’aventure. Étrangement
nous arborons la même veste, question de génération sans doute. Un
p’tit jeune (sans aucun doute le benjamin de l’épreuve) en
pignon fixe vient compléter l’équipe. Pendant le brevet un
camarade inconnu venu de Naoned se trouvera bien à son aise au sein
de notre meute inoffensive et pédalera une grande partie de la
journée avec nous.
8h pile nous voilà
donc partie avec les quelque 140 personnes inscrites à ce brevet
organisé par le RCA. Malgré notre grande discrétion, nous ne
passons pas inaperçu dans le peloton. Nous n’étions pas encore
sorties d’Angers qu’un monsieur se porte à ma hauteur et me dit
« Vous êtes l’équipe de la rue Maillé, je vous ai reconnu
tout de suite ! ». C’est sûr entre nos dégaines (comme
dans les manifs on aime bien pédaler tout en noir!) et nos vélos (2
en monovitesse, un autre en fixe, aucun vélo en carbone) on était
un peu les « vilains petits canards » de la troupe.
Je découvre petit à
petit le plaisir de rouler en peloton, même si cela demande une
grande concentration. On roule, on roule, on se laisse emmener. On
fait des relais derrière un tandem mixte qui nous protège drôlement
bien. On les double en montée et ils nous dépassent dans la
descente et sur le plat. Tout va pour le mieux.
Pointage surprise
à 50 kms d’Angers, un collègue m’annonce « On est à 27
de moyenne ». Moi j’avais jamais fait ça, même sur des
sorties plus courtes. Je suis étonné de réussir à tenir ce
rythme. Mes convictions politiques n’en sont que renforcées :
c’est collectivement que nous sommes les plus fort·e·s !
Une crevaison divise
notre groupe. Ayant déjà fait plusieurs allers-retours depuis
l’arrière je décide de suivre deux compères pour continuer à
avancer tranquillement. Je me retrouve en compagnie de mon camarade
trentenaire et de notre informaticien maison. Ce dernier est bien
décidé à nous mener la vie dure aujourd’hui et malgré des
averses qui ralentissent un peu notre progression ceux qui se sont
arrêtés pour accompagner la crevaison ne nous reverrons pas avant
le premier pointage officiel à La Guerche-de-Bretagne.
Ici nous prenons une
première courte pause. Un sandwich avalé vite fait devant l’As
des Lots du bled, le partage de sublimes gâteaux énergétiques
réalisés par notre sponsor Les Casse-Croûte de Suzy (qu’elle soit ici remerciée une nouvelle
fois !), et nous revoilà sur les routes.
Je dois bien avouer
que certaine partie de la journée manque à mémoire, alors même
que j’écris ces lignes seulement quelques heures après notre
retour. Je retiendrais peut-être la présence sur les bas-côtés de
chiens qui tenaient plus des poneys shetlands que des caniches à
mamies. J’ai peur de beaucoup de choses, mais pas des chiens, ce
qui n’est pas le cas de tous mes compères. Certains démarrent des
accélérations fulgurantes à la vue des gros toutous, pourtant bien
à l’abri derrière leur clôture.
Ce trou de mémoire
est sans doute dû à la certaine monotonie d’une partie du
parcours. Mais monotonie ne rime pas ici avec ennui. Non, bien au
contraire. C’est que ça n’arrête pas de monter, et logiquement
de descendre. Comme des petites montagnes russes.
À chaque virage je
me demande à quelle distance se trouve la prochaine montée et tente
d’analyser au pifomètre les pourcentages qui nous attendent.
Quelques kilomètres
après Soudan une côte plus importante que les autres nous coupe le
sifflet. Notre groupe qui avait pourtant le verbe haut depuis le
départ, est muet comme une carpe. En haut ça rouspète sec, mais ça
tient bon. On continue de rouler.
Et on arrive
rapidement au deuxième pointage. Il était temps, mes fesses
commencent à me renvoyer des sensations très étranges, entre
fourmillement et douleurs. Le pointage se fait dans un bar. Le
taulier à l’air un peu dépassé, d’autant que nous arrivons
tous avec nos bidons à faire remplir. Une affiche 44=BZH me rappelle
que la politique est partout. Même dans le bar de Grand-Auverné.
Point le temps de disserter avec le tenancier et de présenter mon
pedigree de basque qui lui aussi est issu d’un peuple qui souffre
de l’oppression d’un État centralisateur. Non, on avale encore
un bout de casse-dalle, on boit son Coca, on grignote un petit bout
de gâteau énergétique et on repart. Allez il ne reste plus que 70
kms. « C’est comme si on repartait pour une de nos sorties du
dimanche » me glisse mon comparse néo-trentenaire.
En termes de météo
ce dernier tronçon est beaucoup, beaucoup plus agréable. Il fait
même chaud et ça, ça fait plaisir ! Nous continuons à rouler
à rythme soutenu et la topographie est toujours la même : ça
monte un peu, ça descend un peu, ça monte, ça descend. Je tiens
tant bien que mal. Çava passer, ça va passer, résonne dans ma tête. Les noms de
bleds commencent à me parler un peu plus. C’est rassurant !
Je passe les dernières kilomètres en chasse-patate derrière notre
informaticien qui a survolé l’épreuve et le champion poitevin. Je
jette mes dernières forces dans la bataille.
Et me voilà arrivé
au Vélodrome. Ça y est j’ai bouclé mon premier 200 ! Reste
plus qu’à faire tamponner mon carton. Je rentre dans le
préfabriqué qui jouxte la piste. Entre les sandwichs au fromage et
les « odeurs d’efforts » des cyclistes déjà là, je
suis à deux doigts de tomber dans les pommes. Mais non, je parviens
à me faire tamponner et à attraper d’une main ferme un sandwich
aux rillettes et une salutaire canette de Coca pour sortir prendre
l’air. Déjà notre petit groupe est réuni.
Nous voilà assis au
soleil, à manger nos sandwichs et à refaire la journée. Certains
se préparent pour des distances plus longues. Pour moi la saison
officielle s’arrêtera sur cette distance.
Je dois dire que
même si j’étais persuadé de pouvoir terminer cette distance je
ne pensais pas finir « aussi bien ». J’étais dans un
bon jour comme on dit. Bon quand même les douleurs dans la partie
inférieure de mon corps à l’heure où j’écris cette quelques
lignes me rappellent quand même que je ne suis sans doute pas encore
tout à fait prêt pour m’inscrire sur la Grande Boucle. Même pas
sur le circuit Cholet-Pays de la Loire.
Tout ça pour dire
que ça a été pour moi vraiment une belle expérience, une belle
journée et la partager avec des copains a été la cerise sur le
gâteau énergétique !
G.
P.S : Pour les
staticien·ne·s on a parcouru les 200 kms en 8h environ (pauses
comprises) à une vitesse moyenne de 25 km/h. (note de l’éditeur :
8h35 et 23 km/h est plus juste)
3 commentaires:
Z'avez pas eu de vent entre La Guerche et le gd Auverné ?
Content d'avoir de tes nouvelles tu n'as pas disparu !
Le vent je ne m'ensouviens même pas...
Félicitations !
Ça laisse des traces, Ça fait mal au c** mais tout ça dans le bon sens du terme !
Good Job !
Enregistrer un commentaire