Je vous convie à une safari urbain dont vous êtes le héros ou l'héroïne. Détail d'importance, vous n'êtes pas dans le 4x4 qui soulève un nuage de poussière et de terreur. Vous êtes la proie qui pédale et qui tente d'éviter le para-buffle et qui monte la côté de l'avenue Patton à Angers, en direction du quartier de Belle-Beille. Fraîchement rendue à la circulation après l'arrivée d'une ligne de tram vous allez constater que rien n'a été oublié pour (littéralement) rendre impossible la vie des cyclistes.
C'est parti pour une montée aux enfers (pour la descente la prudence m'a invité à prendre un autre chemin).
D'entrée de jeu ça commence mal, pour rappel on est sur un axe fréquenté avec des pics aux heures d'embauche et de débauche (étudiante). Une voie unique qu'il faut "partager". "Partager" ça ressemble exactement dans le safari à ces images où tous les habitant-e-s de la savane viennent étancher leur soif auprès de l'unique mare à des lieues à la ronde. Tout le monde à la même enseigne autour de l'eau : crocodiles, lions et vous braves cyclistes, agiles mais tendres gazelles.Il va sans dire que je me suis vite éloigné de la mare pour rouler sur le trottoir.
Soudain, un quelconque aménageur a du penser que pour l'avenir il fallait peut-être que les prédateurs ne ponctionnent pas trop de proies. Une réserve apparaît donc sur le trottoir pour quelques centaines de mètres. Attention à ne pas se casser la gueule car il reste une petite marche à l'entrée. Sans doute une manière de se débarrasser de lafaune la moins adaptée à cet environnement hostile ? Bel exemple d'aménagement cyclable darwiniste.
Charmante image pour signifier aux créatures pédalantes où les urbanistes rêvent de les voir disparaître. Un bac à compost aurait été plus facile à défendre en terme de communication.
En tant que proie, notre univers mental est saturé de signaux faibles qui nous avertissent d'un danger imminent. Là, on est quand même plutôt dans le registre des pilotes de ligne qui abordent une piste à Roissy/Charles de Gaulle. J'en ai mal à la tête.
Et soudainement c'est tout le contraire : démerdez-vous ! Une pénurie de marquage au sol ? La flemme ? Une expérience inspirée de Milgram ?
Là, on revient bien dans le thème du safari quand les frêles gazelles tentent des manœuvres de diversion en zigzaguant. Quitte à rater un aménagement cyclistes un peu de fun aurait pu être apporté en remplaçant les panneaux par des poteaux de ski-slalom. On aurait pu frôler la bonne trajectoire au plus près.
Ce passage sur le haut de l'avenue est burlesque. Je crois bien que le ville d'Angers prend un peu trop au pied de la lettre l'expression "zone de rencontre". Si vous y croisez un-e congénère le choc risque d'être violent.
Encore une belle démonstration de l'intérêt que portent les édiles de cette ville envers les usager-e-s de la bicyclette. J'aime beaucoup la phrase attribuée à Beckett : "Essayer encore, rater encore, rater mieux." Je ne me doutais pas que des élu-e-s pouvait en tirer un contresens d'une telle maestria : une sorte de poésie urbaine vénéneuse et tellement grotesque. Bravo.
1 commentaire:
Un aménagement exemplaire.
Bonne compilation des erreurs à ne pas commettre.
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