Cela fait un moment
que j'aimerai proposer une typologie des différentes groupes de
cyclistes. Tel un entomologiste vieille école
légèrement sadique cet exercice me permettrait d'épingler mes
congénères sous prétexte de faire avancer la science. Hélas, la
tache est ardue et ma liste de types de cyclistes donne le tournis
tant les pratiques sont nombreuses et les sous-groupes foisonnants.
L'ampleur du labeur à fournir est décourageante.
J'aimerai tant offrir à l'humanité une œuvre majeure qui fasse une
fois pour toute le tour de la question ! Mais mon naturel
indolent reprend vite le dessus et mon projet de grande fresque prend
la poussière. Aujourd'hui j'essaie de ranimer la flemme
flamme en me disant que certaines des plus grandes œuvres
littéraires sont nées sous forme de feuilletons. C'est pourquoi je
soumets à la justesse de votre jugement la maigre entame de cette
typologie en espérant la compléter avec le temps.
J'attire enfin votre
attention sur le fait que mon travail, bien que drapé des oripeaux
de la science, n'est pas totalement dénué de mauvaise foi et de
cynisme.
Gilles est jaune :
C'est le plus facile
à débusquer dans son environnement urbain naturel. Il ne se dépare
jamais de son gilet jaune. Il le porte tant et plus que souvent il ne
se rend même plus compte de l'incongruité de sa mise en certaines
occasions. Pour une sépulture, il sera vêtu de son costume le plus
strict mais il ne lui viendra pas à l'esprit de se défaire de son
attribut coloré. Le gilet jaune c'est l'emblème de son
militantisme, car il faut bien reconnaître qu'il est souvent investi
dans une association d'usagers de la bicyclette. Il est tellement
militant qu'il saoûle parfois les autres cyclistes avec son côté
père-la-morale surtout quand il est question de sécurité.
Certain-e-s mauvaises langues disent que c'est un flippé de la vie
qui camoufle son anxiété en se rendant le plus visible possible.
Une sorte de faisan des villes. Cette théorie ne manque pas de
justesse lorsque sous sa forme pathologique, Gilles n'envisage pas de
déplacement sans accompagner son gilet jaune, d'un casque, d'un
écarteur de danger et une d'une trompe à air comprimé. Histoire de
garder une forme d'individualité Gilles se démarquera de ses
congénères par le flocage de son uniforme: association
d'usagers du vélo, soutien à Notre-Dame-des-Landes, invitation à
le dépasser en respectant une distance de sécurité (attention sans
jeu de mots tenez-vous à distance de ce type de personnage), dessin
issu du travail des CP de l'école du petit dernier.
Expression type :
Commence en général ces phrases par On ne vous voit pas bien
…
Le
cousin-germain :
Pour
lui, le coeur du monde cycliste bat outre-Rhin. Il ne jure que par la
robustesse et la praticité. En conséquence son vélo est allemand,
son éclairage est allemand, sa bagagerie est allemande, ses pneus
sont allemands, ses vêtements sont allemands. Il est clairement fort
bien équipé, même si pour cela il a hypothéqué sa maison. Ainsi,
sa descendance jouira (ou subira tout est question de point de vue)
ses achats jusqu'à la fin des temps. Ses détracteurs (qui comptent
une bonne partie de sa descendance) lui renvoient souvent à la face
son côté un poil rigoriste et le peu de place laissé à
l'improvisation dans sa pratique. Effectivement, s'il consentira
volontiers à passer ses vacances à l'Eurobike de Frederischafen il
sera plus réticent à l'idée d'une bonne teuf techno sous acide
dans un vieil hangar humide du Templehof.
Expression
type : Il n'y a pas de mauvais temps, il n'y a que du mauvais
équipement.
Idéfix :
C'est le chevalier de l'asphalte, sur son pignon fixe il parcourt la
ville (il ne sait pas qu'au delà du périphérique il y a tout un
monde) le plus vite possible en laissant une trace fluo derrière
lui. Sa passion du skid (dérapage stylé) lui coûte tellement cher
qu'il doit travailler le soir à livrer des pizzas et des sushis tard
dans la nuit avec le maigre espoir de gagner assez afin de s'acheter
un nouveau pneu qui tiendra jusqu'au shift (service stylé) suivant.
Néanmoins, au grand soulagement de ses parents sa passion pour le
pignon fixe a fait décoller son niveau en anglais qui était
jusque-là médiocre. Désormais son fixed-gear brakeless, lui permet
d'enchaîner les shifts afin de se procurer un paquet de pièces
New-Old-Stock, New-In-Box pour son futur daily full Campa. Vous
n'avez rien compris ? Lui non plus.
Expression type : Trop stylé !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire