mardi 20 février 2018

Collection sadique


Cela fait un moment que j'aimerai proposer une typologie des différentes groupes de cyclistes. Tel un entomologiste vieille école légèrement sadique cet exercice me permettrait d'épingler mes congénères sous prétexte de faire avancer la science. Hélas, la tache est ardue et ma liste de types de cyclistes donne le tournis tant les pratiques sont nombreuses et les sous-groupes foisonnants. L'ampleur du labeur à fournir est décourageante. J'aimerai tant offrir à l'humanité une œuvre majeure qui fasse une fois pour toute le tour de la question ! Mais mon naturel indolent reprend vite le dessus et mon projet de grande fresque prend la poussière. Aujourd'hui j'essaie de ranimer la flemme flamme en me disant que certaines des plus grandes œuvres littéraires sont nées sous forme de feuilletons. C'est pourquoi je soumets à la justesse de votre jugement la maigre entame de cette typologie en espérant la compléter avec le temps.

J'attire enfin votre attention sur le fait que mon travail, bien que drapé des oripeaux de la science, n'est pas totalement dénué de mauvaise foi et de cynisme.

Gilles est jaune :
C'est le plus facile à débusquer dans son environnement urbain naturel. Il ne se dépare jamais de son gilet jaune. Il le porte tant et plus que souvent il ne se rend même plus compte de l'incongruité de sa mise en certaines occasions. Pour une sépulture, il sera vêtu de son costume le plus strict mais il ne lui viendra pas à l'esprit de se défaire de son attribut coloré. Le gilet jaune c'est l'emblème de son militantisme, car il faut bien reconnaître qu'il est souvent investi dans une association d'usagers de la bicyclette. Il est tellement militant qu'il saoûle parfois les autres cyclistes avec son côté père-la-morale surtout quand il est question de sécurité. Certain-e-s mauvaises langues disent que c'est un flippé de la vie qui camoufle son anxiété en se rendant le plus visible possible. Une sorte de faisan des villes. Cette théorie ne manque pas de justesse lorsque sous sa forme pathologique, Gilles n'envisage pas de déplacement sans accompagner son gilet jaune, d'un casque, d'un écarteur de danger et une d'une trompe à air comprimé. Histoire de garder une forme d'individualité Gilles se démarquera de ses congénères par le flocage de son uniforme: association d'usagers du vélo, soutien à Notre-Dame-des-Landes, invitation à le dépasser en respectant une distance de sécurité (attention sans jeu de mots tenez-vous à distance de ce type de personnage), dessin issu du travail des CP de l'école du petit dernier.

Expression type : Commence en général ces phrases par On ne vous voit pas bien

Le cousin-germain :
Pour lui, le coeur du monde cycliste bat outre-Rhin. Il ne jure que par la robustesse et la praticité. En conséquence son vélo est allemand, son éclairage est allemand, sa bagagerie est allemande, ses pneus sont allemands, ses vêtements sont allemands. Il est clairement fort bien équipé, même si pour cela il a hypothéqué sa maison. Ainsi, sa descendance jouira (ou subira tout est question de point de vue) ses achats jusqu'à la fin des temps. Ses détracteurs (qui comptent une bonne partie de sa descendance) lui renvoient souvent à la face son côté un poil rigoriste et le peu de place laissé à l'improvisation dans sa pratique. Effectivement, s'il consentira volontiers à passer ses vacances à l'Eurobike de Frederischafen il sera plus réticent à l'idée d'une bonne teuf techno sous acide dans un vieil hangar humide du Templehof.

Expression type : Il n'y a pas de mauvais temps, il n'y a que du mauvais équipement.

Idéfix :
C'est le chevalier de l'asphalte, sur son pignon fixe il parcourt la ville (il ne sait pas qu'au delà du périphérique il y a tout un monde) le plus vite possible en laissant une trace fluo derrière lui. Sa passion du skid (dérapage stylé) lui coûte tellement cher qu'il doit travailler le soir à livrer des pizzas et des sushis tard dans la nuit avec le maigre espoir de gagner assez afin de s'acheter un nouveau pneu qui tiendra jusqu'au shift (service stylé) suivant. Néanmoins, au grand soulagement de ses parents sa passion pour le pignon fixe a fait décoller son niveau en anglais qui était jusque-là médiocre. Désormais son fixed-gear brakeless, lui permet d'enchaîner les shifts afin de se procurer un paquet de pièces New-Old-Stock, New-In-Box pour son futur daily full Campa. Vous n'avez rien compris ? Lui non plus.

Expression type : Trop stylé !

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