Ad vitam

L'un de vous m'a fait particulièrement peur au téléphone. M'appelant pour divers renseignements, il demande mes horaires d'ouverture du jour. Suite à ma réponse peu articulée je le concède, il me demande si je suis ouvert "ad vitam".

 

Mes cours de latin sont loin mais je me souviens que cette locution signifie grosso mierdo "pour toute la vie".

 

Je me suis vu sur mon lit établi de mort, le fouet à chaîne à la main expirant mon dernier souffle à un âge canonique. Je n'avais connu ni retraite, ni repos. Je mourrai sans préavis. J'allais faire un-e client-e mécontent-e. Pire, j'aurais peut-être même un avis négatif sur une plateforme quelconque.

 

Dans la seconde qui a suivi, je me suis souvenu que, par facilité, cette expression est aussi employée comme contraction de ad vitam aeternam qui signifie plus ou moins "pour l'éternité". Là je me suis vu dans un au-delà vaporeux (auquel veuillez noter que je ne crois pas, malgré les régulières recommendations à divers dieux par nombre de client-e-s) qui avait toutes les apparences de mon atelier. Couvert de cambouis, respirant des vapeurs fétides de brake cleaner, la peau mordue par du fluide hydraulique DOT 4, j'expiais des péchés indicibles entouré d'une clientèle mécontente et vétilleuse de diables et de diablesses à la recherche d'un prix plus attractif que chez All Components ou Bike Tricks.

 

L'Enfer.

PS : l'illustration est de Gustave Doré.