lundi 10 septembre 2018

L'évasion à vélo


Je crois bien avoir dédaigneusement balayé du regard la couverture de L'évasion à vélo une bonne dizaine de fois lors de mes emplettes en librairie. La couverture n'a pas joué son rôle d'hameçon et j'ai (trop) souvent un a priori négatif en matière d'histoire locale ou régionale. Cela m'évoque de vieux messieurs rabougris et ronchons qui compilent la liste des lieux-dits où un quelconque roi de France dégénéré aurait, par le plus grand des hasards, passé la nuit entre deux chasses au sanglier. N'ayant rien contre les sangliers, vous comprendrez que je ne partage pas cette vision de l'histoire.

C'est donc un peu de guerre lasse que j'ai acheté cet ouvrage. Grand bien m'en a pris. Lucien Laurendeau est un angevin qui à la fin de le "drôle de guerre" est fait prisonnier au début de l'été 1940 dans l'est de la France. Plutôt que d'être balloté par les évènements cet homme choisit de s'évader et de regagner son foyer. Le livre n'est ni plus ni moins que le récit de ces 700 km principalement parcourus à vélo, avec toutes les péripéties imaginables en pleine Débâcle. Une histoire racontée en toute simplicité dont le manuscrit a été retrouvé par ses enfants dans les affaires familiales.

Le livre est fort agréablement muni de cartes qui permettent de visualiser le parcours de notre obstiné narrateur. A la fin, il y a aussi une mise en perspective de la petite histoire  avec des repères de l'historien Jacques-Guy Petit. Enfin quelques illustrations, des photos et des reproductions du manuscrit complètent ce petit opuscule de 55 pages. Le tout est disponible pour la modique somme de 7€.

Les actes de Lucien Laurendeau correspondent à merveille à l'idée de "common decency" forgée par l'écrivain socialiste Georges Orwell à propos des classes populaires. C'est cette "décence ordinaire" qui a poussé ce soldat qui n'a rien du héros belliqueux à choisir l'évasion contre l'avis de ses camarades de chambrée. Simplement parce que celui lui paraissait être le comportement moral juste et approprié. C'est aussi de décence ordinaire dont il s'agit quand il se voit offrir mille petits services voire un vieux vélo : Ils ne veulent pas que je les paie ! Ah ! les brave gens. J'ai essayé de les retrouver bien des années après, mais ils étaient partis.


L'évasion à vélo, Un soldat en 1939-1940, Lucien Laurendeau, Ginko éditeur, 2018.


Post-scriptum : Mon exemplaire est bien titré L'évasion à vélo et non La fuite à vélo comme le suggère l'illustration. Le livre a sans doute été renommé.




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