vendredi 6 avril 2018

Pompier pyromane

Chose promise, chose due, voici la suite de mes mésaventures pyrotechniques qui démarrent mal et finissent bien.

Edgard* doit avoir autour de 5 ans quand se déroulent les faits. C'est un petit garçon énergique qui aime traîner à l'atelier. Il préfère l'action à l'observation. Une de ses activités préférées consiste à percer des trous à la perceuse à colonne dans des bouts de carton. Il aime aussi utiliser le touret pour qu'on fasse des étincelles avec un bout de ferraille sorti de ma poubelle de recyclage où fabriquer une infâme bouillie composé d'un mélange approximatif de WD-40, d'huile de chaîne et de graisse.

En général mon établi et mon cerveau sont sans dessus-dessous après le passage d'Edgard.

Un jour, je lui propose une expérience amusante qui est censé participer à son édification. Je lui explique qu'on va mettre le feu à mon établi et que je vais lui montrer comment l'éteindre. Belle intention éducative, non ?

Je range mon établi et écarte tout ce qui pourrait prendre feu. Edgard est calé contre moi. J'arrose copieusement mon établi d'alcool industriel. D'un petit coup de briquet surgit une belle flamme bleue qui danse doucement devant son regard ébahi. J'avais tout prévu sauf l'imprévu. J'ai voulu laisser un souvenir impérissable dans sa cervelle de moineau j'ai mis plus de combustible que de coutume (oui, j'aime jouer avec le feu) et la flaque qui devait être circonscrite à mon plan de travail se déplace vers le bord jusqu'à chuter sur le sol de de l'atelier, d'abord au goutte à goutte, puis un peu plus rapidement en un mince filet lumineux.

Désormais, l'éducateur improvisé doit gérer deux flaques de feu. Je perds un peu de ma contenance et cherche à abréger l'expérience. Je saisis le premier chiffon venu afin d'étouffer l'affaire. Manque de bol, il s'enflamme instantanément. Maudit tissu synthétique ! Edgard se blottit un peu plus fort contre moi alors que des mots interdits aux chastes oreilles enfantines franchissent mes lèvres. Je jette le chiffon à terre et piétine le tout en une folle sarabande. Je suis clairement dépassé par les événements mais par miracle et par manque de combustible le feu s'épuise. Moi avec. En sueur, je reprends un poil d'aplomb et je tente de sauver les apparences en affirmant à Edgard un truc du genre : Tu vois, le feu c'est dangereux, il ne faut pas jouer avec, tu comprends ? Son visage est blême. Il a parfaitement reçu la leçon, même si la méthode était paradoxale.

Quelques jours plus tard, je revois Edgard. Il m'embrasse et me dit tout de go : Dis, tu me promets de plus jouer avec le feu, tu m'as fais très peur !

Je lui ai prêté serment.




*En bon journaliste le prénom a été changé.

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