Moisson

Autant que possible, je gère le stock de vélos de l'atelier par l'envoi de textos. Dès qu'une réparation/modification est effectuée j'en informe le ou la propriétaire. Avec un peu de chance, si je suis en avance sur mon programme je fais d'une pierre deux coups : le vélo dégage plus tôt que prévu et le/la cycliste est ravi-e de retrouver son destrier chéri avant la date convenue. Il y a des jours de grande productivité où je fais fumer mon pouce. Les messages porteurs de bonne nouvelle se succèdent sans discontinuer.

Dernièrement, un client a répondu à mon message bien des jours après son envoi. Mes vacances en étaient même passées du statut de projet à celui de souvenir. Il m'annonçait qu'une connaissance allait passer récupérer son vélo. Le hic, c'est que je ne savais plus vraiment de quel vélo il s'agissait parmi mon cheptel du moment. Pour m'aider dans ma quête, mon corres' avait eu l'idée de "préciser" quel était son vélo :

Aïe ! J'ai jeté un regard craintif autour de moi. Mon atelier est alors apparu tel un échantillon représentatif du marché du cycle hexagonal de ces vingt dernières années :

Dire que parfois on me demande si je répare "aussi" les Btwin. Ce à quoi je réponds en grand humaniste de la bicyclette que je ne pratique pas d'ostracisme.

En y réfléchissant bien, je me dis que la langue française, bien que débordante de générosité, mérite encore d'être enrichie. Il est un secteur de la langue qui avec le délitement de la société paysanne est laissé en "jachère", si vous me permettez de rester dans le registre bucolique. Les proverbes, autrefois foisonnants parlaient de tout et surtout de rien. Depuis lors, ce registre se renouvelle peu ou pas. Je tiens donc à apporter ma scélérate contribution.

La sagesse populaire cherche une aiguille dans une botte de foin. Il s'agit là d'une tâche malaisée mais, avec un peu de technique et beaucoup de magnétisme, elle reste envisageable. Par analogie, mon fardeau quotidien m'oblige parfois à chercher du foin dans une meule de foin, vous conviendrez que la tâche est autrement plus ardue mais vous n'êtes pas sans savoir que la mécanique-vélo est un sacerdoce.